La production d’écrits est un exercice difficile en dispositif ULIS, encore plus que la lecture. Aussi est-il souvent relégué à un avenir plus ou moins lointain : quand on aura le temps, quand on aura vu tous les sons, quand…les poules auront des dents ! J’ai eu beaucoup de mal à trouver un fonctionnement qui me convienne dans ce domaine mais cette année, j’ai (enfin) trouvé la manière de traiter la production d’écrits qui me convient.
Attention, ce que j’expérimente actuellement n’est, comme son nom l’indique, qu’un essai d’organisation que j’alimente et transforme au fil des séances et de mes observations. Il correspond à ma manière d’enseigner et aux groupes que j’ai actuellement. Ce n’est en rien un modèle mais plutôt un exemple de cheminement et d’adaptations pour optimiser le temps dans le dispositif.
1- Genèse du projet : Le bêtises de Fimo
En décembre, Fimo le lutin du Père Noël est venu nous rendre une petite visite. Chaque jour, il faisait une bêtise/farce dans le dispositif. Dans un groupe, les élèves légendaient la photo dans leur cahier du jour en construisant une phrase sur le modèle : Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? La phrase encodée (avec plus ou moins d’aide) pouvait ensuite servir de support pour l’analyse grammaticale et un travail renforcé autour d’un point de grammaire/orthographe/conjugaison. Par exemple, lors des premières séances, nous avons travaillé le double sujet « Fimo le lutin il a fait … » : l’occasion d’aborder le rôle des pronoms !
Pendant ce temps, le second groupe travaillait avec moi pour produire un court texte de description de la bêtise. Pour la première bêtise, nous avons travaillé sous forme de dictée à l’adulte. Les élèves décrivaient la bêtise et j’écrivais au tableau en prenant soin de bien expliciter le lien entre les mots prononcés et ceux écrits. Au fur et à mesure des bêtises, les élèves étaient en charge de l’encodage de plus en plus de mots : au début, ils n’écrivaient que les déterminants pour, à la fin, encoder la totalité du texte.
Les textes produits pouvaient ensuite servir de support pour des séances de copie et de lecture ultérieures. Un vrai plaisir pour eux de lire ce qu’ils ont produit et surtout, l’occasion de travailler sur des supports pédagogiques de premier choix :
– le lexique est forcément connu des élèves puisque c’est eux qui ont produit les phrases
– des mots qu’ils sauront décoder puisqu’ils les ont encodés !
Quant aux point négatifs (car il en faut !) :
– il faut être réactif : les textes devront être tapés/mis en page pendant la récréation/pause méridienne pour permettre de revenir sur le texte rapidement (idéalement, le même jour). Cela implique d’avoir accès à un ordinateur avec tous les logiciels (traitement de texte et pictoselector pour moi) et une imprimante couleur.
– les séances sont très (voire très trèèèèèès) longues : en décembre, il n’est pas rare que la séance de maths se retrouve reléguée l’après-midi car nous avions passé toute la matinée à produire nos écrits. Mais ce désavantage est très relatif car les progrès des élèves ont été énooooooormes ! Tellement énormes que j’ai décidé de me relancer dans un projet comparable pendant la période 3 (mais sans le lutin !)
Voici quelques exemples de réalisations :
– Premiers jours : J’écris sous la dictée. On met en évidence majuscules et points, la notion de phrase ; les élèves entourent les mots qu’ils sont capables de lire pour finir par une lecture à 2 voix. Cette séance nous a pris une bonne heure. On dépasse sur la séance suivante… Pas grave : ils sont à fond !
– Bêtise suivante : les élèves écrivent quelques mots. Chacun à sa manière, le geste de l’écriture est difficile au tableau mais l’objectif est d’écouter les sons qui composent les mots.
Au fur et à mesure des séances, de plus en pus de mots sont pris en charge par les élèves.
– Parfois, certains élèves sont invités à copier le texte sur leur cahier du jour. Ils sont fiers de laisser une trace, d’écrire « comme des grands ». Chacun écrit à sa manière : j’accompagne ceux qui veulent/peuvent écrire en cursive. Pour d’autres, ce sera des lettres majuscules. L’objectif : qu’il y ait toutes les lettres pour qu’un adulte ou un camarade qui n’a pas participé à la séance puisse lire le texte.
– Tous les jours, je recopie le texte produit et ajoute les pictogrammes correspondant aux mots importants. Cette fiche devient la fiche de lecture du jour. On travaille avec le jour suivant : chasser les mots, lire des mots, pointer le picto, … Certains élèves veulent tout lire : c’est gagné ! Ils lisent pour le plaisir !
Depuis plusieurs années, je n’ai plus de fiches de lecture « classiques », autour d’un son, que je donnerai systématiquement. Il m’arrive d’en donner une ponctuellement pour un son qui embête un élève mais je trouve que de partir d’un texte écrit par les élèves a beaucoup plus de sens pour eux et pour moi (je suis sûre qu’ils connaissent tous les mots et savent les lire puisqu’ils les ont écrits !).
Voilà où nous en étions fin décembre. Devant les progrès des élèves et leur motivation tout au long du projet « Les bêtises de Fimo », j’ai décidé de continuer sur le même schéma en période 3. Pour cela, j’ai fait des recherches sur les albums sans texte (je ne connaissais que Loup Noir que ma collègue avait utilisé avec les CM1-CM2 du dispo l’année dernière). J’ai donc décidé de partir sur l’album « Le voleur de poule » car il me paraissait parfaitement adapté à l’âge et au niveau de mes élèves. J’ai découvert ensuite qu’il y avait plusieurs albums dans la même collection mais ils ne sont malheureusement plus disponibles ☹
– Les séances sont organisées comme celle du projet « Fimo ». Les élèves ont déjà leurs marques, on peut commencer tout de suite à travailler. Gros point positif : ils aiment les livres ! Dès que j’apporte un nouvel album, c’est comme une nuée d’abeilles sur un pot de miel ! On part donc sur une page (ou une double page pour les illustrations sur deux pages) par jour.
1. Ils décrivent l’image à l’oral. Je les aide pour le découpage en phrases courtes.
2. Ils écrivent chacun une phrase au tableau. Pendant qu’un élève écrit, les autres peuvent encoder sur la table avec un crayon Woody ou écrire juste quelques mots avec des lettres mobiles. J’essaie au maximum que tous soient en activité mais je ne vous cache pas qu’il est difficile de se couper en 4 (minimum). J’ai parfois l’aide d’une AESH qui accompagne une élève qui se joint de plus en plus au groupe de travail.
3. Le texte produit nous sert ensuite de support de lecture et d’entrée en grammaire.
4. Des phrases en lien avec l’album et reprenant le lexique déjà utilisé peuvent servir de support pour les dictées-picto.
5. Les textes produits peuvent être transformés en lectures-picto !
En conclusion, je pense avoir (enfin) trouvé un fonctionnement qui me convient et qui convient à mon groupe de CP-CE1. Après avoir laissé tomber les méthodes de lecture il y a 5 ans, j’ai donc maintenant abandonné les séances de lecture-phono qui ne faisaient pas sens pour eux. Pour les élèves qui connaissent le son des lettres, partir de leurs besoins pour introduire les graphèmes complexes, les mots-outils et la grammaire est une solution intéressante et motivante. A noter toutefois qu’il faut avoir un certain lâcher-prise car vous ne pouvez pas prévoir à l’avance ce que les élèves vont vouloir écrire. Difficile donc de programmer les points de grammaire ou les ateliers de lecture et de prévoir tout le matériel. C’est donc plus facile de mettre en œuvre ce type de séance quand on a déjà du matériel et une sélection d’ateliers dans la classe/dispositif. Toutefois, rien n’est insurmontable et il suffit parfois d’une paire de ciseaux, de feuilles blanches et de feutres pour improviser un atelier mais j’aurai l’occasion d’en reparler dans un prochain article sur notre travail avec un second groupe d’élèves…
Voici quelques albums sans texte qui peuvent servir de support pour des productions d’écrits :
Nous travaillons actuellement dessus avec un groupe de 5 élèves de CE1-CE2. Un article suivra prochainement…
Je l’ai acheté aussi. Je pense qu’il est adapté dès le CE1. C’est un album sur l’hiver, je le garde donc pour l’année prochaine !
Gros gros coup de cœur pour les ilustrations de ces deux albums ! En plus d’être magnifiques, elles sont d’une richesse incroyable. Difficiles à exploiter dans mon dispositif à l’écrit mais je les garde dans un coin de ma tête pour un atelier de langage oral. En cycle 3 ou même en ULIS-collège ou SEGPA, ils pourraient donner naissance à des histoires géniales !
La collection « Petit poilu » : j’ai vu passer ces BD sur les réseaux sociaux plusieurs fois mais je ne les ai pas à la maison mais je les ai feuillés en faisant les courses. Je vais peut-être en acheter un pour tester sur des temps plus courts. Le format BD me plaît beaucoup.
Je continue mes recherches d’autres albums sans texte… Si vous en connaissez et qu’ils sont facilement disponibles en grande surface/librairie ou Vinted
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